À travers la création de circuits écotouristiques, l’association IRADA pour le Développement de Tozeur, en Tunisie, a réussi à influencer des décisions telles que la fermeture d’une décharge non contrôlée, à créer de l’emploi pour plusieurs familles et à attribuer des revenus supplémentaires pour les personnes travaillant dans le secteur du tourisme. La reconnaissance en tant que commune touristique de la ville de Degache est un des principaux objectifs du projet : une initiative soutenue par le ministre du Tourisme et de l’Artisanat René Trabelsi.
La diversité du potentiel saharien : un atout pour la promotion de l’écotourisme
Dans le cadre du PPI-OSCAN (Programme des Petites Initiatives pour les Organisations de la Société Civile d’Afrique du Nord), l’association IRADA propose des solutions adéquates aux problèmes repérés dans cette région, notamment la valorisation de l’écosystème et l’impulsion de l’activité économique.
À travers la mise en place d’un circuit géo-touristique qui respecte les équilibres environnementaux de la région et permet de réduire les effets des changements climatiques. En effet, ce circuit contribue à l’amélioration des conditions de travail et de vie des propriétaires des aires de repos installées tout au long la route du Chott El Jérid car il leur permet de réaliser plus de ventes : les propriétaires des relais touristiques et de jeunes diplômés ont bénéficié de revenus et en tout, 15 caléchiers et 8 vendeurs locaux ont bénéficié d’aides financières.
L’ONG favorise aussi une prise de conscience environnementale locale, nationale et mondiale afin de faire face à la pollution environnementale et aux dépassements humains et de renforcer l’attractivité de la région de Chott Jerid et les régions limitrophes en tant que site touristique, grâce à la mise en place d’activités telles que le trekking, les randonnées pédestres et équestres etc.
Elle prévoit également la mise en place de campagnes de nettoyage et d’entretien qui serviront à la sensibilisation des populations à la préservation de l’environnement et à la réappropriation de leur patrimoine naturel et culturel.
Chott El Djérid, berceau de la civilisation oasienne
En Tunisie, Chott El Jérid est une vaste dépression salée située entre la chaîne de montagnes du Cherb au nord et le désert du sud. Considérée comme étant la plus vaste du chapelet de dépressions entre la steppe et le désert, elle représente le berceau de la civilisation oasienne. La région est même considérée par le BirdLife International comme étant une zone d’importance internationale pour la conservation des oiseaux. Le site est inscrit sur la liste exhaustive du patrimoine mondial de l’UNESCO.
Mais les menaces qui planent sur Chott El Jérid ont un impact direct sur la biodiversité et se manifestent principalement à travers deux phénomènes :
- L’augmentation et l’expansion des déchets ménagers et solides, notamment dans les secteurs proches des concentrations urbaines (gouvernorat de Tozeur au Nord et gouvernorat de Kebelli au Sud). La cause : Une décharge non contrôlée exploitée par la municipalité de Degache dans la région de Sidi Bouhlel. L’association négocie actuellement avec le conseil municipal pour le délocaliser.
« Nous avons déjà réussi à influencer la municipalité pour qu’elle ferme une décharge non contrôlée à coté de Chott Jérid » déclarent les membres de l’association.
Ces déchets constituent de véritables sources de nuisances et pollutions pour le paysage et les espèces floristiques (végétation halophile, c’est-à-dire qui croît dans les régions salées) et faunistiques (sanglier sauvage, flamant rose et cigogne blanche). Ils sont notamment composés d’une importante quantité de plastique et peuvent être facilement déplacés par le vent, ce qui accroît leur risque d’expansion géographique et de nuisibilité.
- La pollution croissante du réseau En effet, situé dans une position topographique déprimée, Chott El Jérid représente un niveau de base naturel pour l’ensemble des artères hydrographiques du Sud-ouest de la Tunisie. Mais ce réseau hydrographique est partiellement utilisé pour l’évacuation des eaux usées par l’ONAS (Office National d’Assainissement) et/ou des eaux pluviales. Les apports hydriques et solides considérables sont souvent évacués dans le Chott El Djérid sans se soucier des éventuels impacts biochimiques.
Chott El Jérid joue un rôle essentiel dans le régime hydraulique de toute la région avoisinante de par ses oasis de Degache, Tozeur et Neha ainsi que le groupe d’oasis du Nefzaoua qui sont nourris par les eaux des nappes artésiennes souterraines.
« Cette alimentation en eau se faisait autrefois naturellement à travers des sources artésiennes – puits -, mais aujourd’hui elle se fait par sondage. Le site constitue un élément fondamental de l’écosystème oasien car il forme le niveau de base pour les eaux de drainage des oasis et a une influence certaine sur la qualité des dattes, très consommées par la population locale. Ainsi, une pollution de ces eaux représenterait un obstacle à la sécurité alimentaire des habitants de la région. »
C’est dans cette région classée comme zone humide en 2007 par la convention Ramsar et où l’activité principale repose sur l’agriculture, la production de sel et le pâturage du bétail, que les membres de l’association IRADA ont décidé de mettre en place des activités écotouristiques permettant la valorisation du site.
Chott El Jérid est la plus vaste plaine saline – sebkha tunisienne – et la plus grande des sebkhas de tout le Maghreb. La région est composée d’un mélange de divers paysages naturels avec des zones couvertes de sel, d’oasis ou de dunes et s’étend sur une superficie de plus de 586 hectares.
Cependant, ces dernières années, bien qu’il s’agisse d’une ville à dominante agricole, Degache est devenue la seconde délégation du gouvernorat avec 21,4% du poids démographique total. Cela implique des changements notables qui ont fortement impacté la biodiversité, comme l’aménagement de routes sur le site,l’urbanisation croissante, l’extension des périmètres irrigués sur ses bordures, les salines industrielles et d’autres activités qui menacent ses paysages et vestiges exceptionnels et laissent peser des incertitudes sur la préservation de cet écosystème.
Une association au plus proche de la population locale
L’association IRADA tient régulièrement des réunions avec les acteurs de la société civile et la collectivité locale afin de développer leurs activités dans la région et de sensibiliser les citoyens à la protection de l’environnement. Les locaux sont très impliqués dans le travail associatif et le développement de ces parcours touristiques leur sera bénéfique sur le moyen-long terme, grâce à la création d’emplois.
Le développement des agriculteurs locaux à travers un système d’agriculture innovant est aussi une partie importante du projet de l’association. L’objectif est d’identifier les besoins des agriculteurs en matière de plantation de nouveaux cultivars, de les encourager en matière de réhabilitation de la biodiversité et de les sensibiliser à une gestion rationnelle de l’eau d’irrigation. Elle travaille également auprès des femmes et des jeunes.
« Nous impliquons les femmes et jeunes dans les initiatives de conservation des traditions et savoir-faire artisanaux liés aux dattes et aux sous-produits dattiers et proposons des solutions pratiques pour valoriser les sous-produits de divers cultivars de manière à inciter les agriculteurs à les replanter dans leurs parcelles » expliquent les membres de l’association.
